Je m'attendais à un match plus difficile aussi mais là, c'était le Roger des GC
"Ma victoire à Roland-Garros était un moment parfait"
Par Cécile Soler 23/05/2011 |
Il a tout gagné ou presque. Soit seize titres du Grand Chelem, dont Roland-Garros en 2009. Numéro un mondial pendant 285 semaines, le Suisse nous dit combien sa relation avec le tournoi de la Porte d'Auteuil est singulière.
Quand on vous dit Roland-Garros, quelle est la première image qui vous vient à l'esprit ?
Roger Federer Celle où je m'écroule sur le terrain du côté revers lorsque Söderling rate son retour de service sur la balle de match de mon titre. C'est aussi l'image que je garde parce que j'ai vu beaucoup de photos et de films de ce moment. Parce qu'après être passé si près du sacre à plusieurs reprises et avoir tellement déployé d'efforts, c'était vraiment un rêve réalisé que j'ai voulu garder avec moi. Je sais que je ne revivrai peut-être jamais un moment aussi fort dans ma carrière que celui-ci, avec Mirka enceinte dans les gradins. C'était un moment parfait.
D'autant plus que vous avez connu beaucoup de désillusions dans ce tournoi, au début de votre carrière...
Il y a six ou sept ans, je n'aurais jamais imaginé m'imposer à Paris. Je trouvais ce central trop grand, trop bizarre. J'ai lutté longtemps avec ce terrain, alors que souvent j'avais bien joué sur la terre battue de Hambourg la semaine précédant Roland-Garros et que j'arrivais avec une certaine confiance. J'ai dû passer de longues heures à m'entraîner sur ce court Philippe-Chatrier et je suis vraiment content que cela ait fini par payer.
Avez-vous vos endroits favoris et vos habitudes à Paris ?
Je ne suis pas un homme de rituels. Mais le fait de ne pas en avoir en est peut-être un en soi. Concrètement, je sais juste que durant cette quinzaine, je vais revoir des amis que j'ai à Paris et pour le reste, je préfère laisser la place à la spontanéité. D'autres amis peuvent me faire la surprise au dernier moment de débarquer à Paris pour passer le week-end avec moi, par exemple. D'une façon plus générale, Paris est une ville où j'aime bien marcher, surtout maintenant avec les petites, c'est particulièrement agréable de se promener. Mais il ne faut pas oublier que si je veux réussir quelque chose, je n'ai pas beaucoup de temps libre pendant le tournoi.
Vous avez toujours insisté sur le fait que vous vouliez jouer contre plusieurs générations de joueurs. Depuis le jeune conquérant, jusqu'au sage presque trentenaire d'aujourd'hui, en passant par le grand dominateur de 2004-2006, quelle période de votre carrière vous a semblé la plus enrichissante?
Lorsque l'on passe des juniors aux pros, c'est le moment le plus stressant, mais d'un autre côté, c'est tout de même le rêve qui se réalise. Tout d'un coup, je me suis retrouvé à jouer contre Agassi au tournoi de Bâle où j'avais été ramasseur de balles, puis sur le court Suzanne-Lenglen à Roland-Garros contre Patrick Rafter. Là, je me suis dit : «J'ai réussi.» Et ça, c'est quelque chose que l'on ne peut plus enlever à un joueur.
Vous semblez parfois avoir la nostalgie de vos rivalités passées avec Safin, Hewitt...
La période où j'ai joué contre ma génération était agréable, parce que l'on se connaît très bien et on se demande qui va sortir du lot. Safin, Roddick, Hewitt, Ferrero, nous étions nombreux. J'ai apprécié énormément la période où j'ai dominé, parce que je n'arrivais pas à croire que j'étais devenu un si bon joueur et surtout que j'étais parvenu à conserver cette constance pendant plusieurs années. J'étais moi-même choqué d'avoir réussi à mettre toutes mes capacités en phase, alors que pendant longtemps, j'étais connu comme quelqu'un qui avait des hauts et des bas. En plus, durant cette période, je n'avais parfois ni entraîneur ni agent. J'ai beaucoup appris d'être seul sur le circuit avec Mirka (Vavrinec-Federer, son épouse) et mes parents, et de tout gérer tout seul, avec juste l'aide d'un avocat. Sauf qu'à partir d'un certain stade, j'ai réalisé que ce n'était plus possible.
Et puis Nadal est arrivé...
La première fois que j'ai joué contre lui à Miami, j'ai réalisé qu'il avait quelque chose de spécial, être aussi fort si jeune sur ciment, alors qu'il était un joueur de terre battue. J'ai commencé à le respecter énormément. Et lorsque j'ai découvert que lui me respectait également beaucoup, j'ai trouvé que cette rivalité était vraiment sympa. Avec son look, mon look, son style de jeu, mon style de jeu, cela créait une super-opposition.
On vous a senti souvent agacé pourtant, par les problèmes qu'il vous posait sur le court...
Evidemment, tout au début, ce n'était pas facile, c'était une période où je dominais et j'ai mis quelques mois à m'habituer à l'idée d'avoir un rival de sa trempe. Au bout d'un moment, je m'y suis fait. Et finalement, il m'a fait progresser, il m'a obligé à réfléchir à ma façon de jouer, de m'entraîner. Parce que personne ne joue comme lui et personne ne jouera comme lui dans le futur, je pense.
Et maintenant, qu'éprouvez-vous face à la montée de Novak Djokovic, Andy Murray et la jeune génération qui arrive derrière eux ?
Si je suis très honnête, en revanche, cette phase est un peu plus difficile pour moi. C'est évidemment moins excitant que de jouer contre Sampras.
Ces jeunes, comment les jugez-vous par rapport à votre génération ?
A un moment, c'était presque inquiétant, il n'y avait plus de joueurs de moins de 20 ans dans les cent meilleurs mondiaux. Mais maintenant, une nouvelle génération arrive, les Richard Berankis, Grigor Dimitrov, Milos Raonic. Je connais Richard Berankis, parce que je l'avais invité à venir à Dubaï il y a plusieurs années. Je connais un tout petit peu Dimitrov, parce qu'il s'est entraîné avec Peter Lundgren (le coach de Federer jusqu'en2003). J'ai toujours eu la volonté de m'entraîner avec les jeunes et de parler avec eux.
Vous sentez-vous un rôle de mentor auprès d'eux ?
Un peu, oui. Je trouve qu'il faut leur expliquer que le circuit, ce n'est pas « moi contre tout le monde ». Le circuit est comme une grande famille, ils vont y passer dix à quinze ans de leur vie, ce n'est pas toujours très facile, alors autant profiter des bons moments. Cela ne doit pas devenir une corvée, parce que beaucoup de gens rêvent d'une carrière comme les nôtres. Même si on est rivaux, cela n'empêche pas de s'entendre. J'espère qu'avec Rafa, on leur a montré que c'était possible. Mais cela ne signifie pas que tout le monde est obligé d'être comme nous. C'est sympa aussi d'avoir des rivalités un peu plus extrêmes que la nôtre.
Vous semblez moins proche de Djokovic que de Nadal, est-ce une impression ?
A un moment, il se disait que je n'appréciais pas ses imitations. Ce n'est pas vrai, je trouve qu'il est rigolo mais jusqu'à un certain degré. Il est inutile d'en faire trop. Il ne faut pas que cela devienne trop forcé et répét.tif, parce que être connu comme le clown sur le circuit, c'est moyen. Mais d'une façon générale, je trouve que ce que j'ai exprimé a été parfois mal interprété.
Vous n'avez jamais semblé être enthousiasmé par son jeu, pourtant ?
Il n'est pas connu pour avoir un coup droit, un revers ou un service incroyables. Mais il est parvenu à réussir quelque chose d'extraordinaire avec les moyens dont il disposait. Il a beaucoup progressé. On m'a reproché également des commentaires sur Murray, parce qu'après avoir perdu contre lui à Dubaï, j'avais dit qu'en jouant de façon aussi défensive, il allait lui être difficile de remporter de grands tournois. Je ne pense pas m'être totalement trompé là-dessus. Les Anglais ont tourné cela à leur façon, prétendant qu'on ne se parlait plus.
Comment parvenez-vous à rester serein par rapport à ce qui s'écrit à votre sujet ?
Quand je joue un peu moins bien, j'évite de lire les journaux. Je passe en conférence de presse et ensuite je ne regarde pas ce qui en sort. Ceci dit, j'ai toujours eu une bonne relation avec les médias. Parce que je me donne beaucoup de mal et je pense que les journalistes l'apprécient. En revanche, je ne comprends pas pourquoi certains se demandent comment je peux continuer à jouer au tennis après avoir réussi à battre le record des victoires en Grand Chelem, et cela en enchaînant les victoires à Roland-Garros et Wimbledon en 2009. Alors qu'en fait, c'est après cela que j'ai pris le plus de plaisir à jouer. Combien de fois vais-je devoir encore expliquer que je suis toujours motivé pour jouer ?
En dépit de votre ultrasensibilité, vous êtes habitué à vivre des émotions intenses en public. Y a-t-il eu des circonstances où cela vous a semblé particulièrement pénible ?
Le décès de Peter Carter, mon ancien entraîneur, m'a malheureusement donné un coup de maturité. J'ai brutalement réalisé que la vie était autre chose que mon petit quotidien, les voyages, etc. Que tout pouvait basculer. Ce décès est intervenu au moment où j'étais en train de percer sur le circuit (2002), alors qu'il y avait tellement de choses que j'avais envie de lui raconter. Et tout d'un coup, c'était devenu impossible. Je pense que cela a vraiment eu un impact important pour moi. Peut-être que j'aurais remporté de toute façon mon premier Grand Chelem à Wimbledon l'année suivante (2003), mais cette disparition m'a rendu plus ouvert sur la vie, que j'ai appréciée un peu plus. Cela m'a également calmé sur le court et j'ai ressenti le besoin de montrer que je pouvais me comporter en professionnel, plus que je l'avais fait dans le passé. Je me suis dit que Peter n'avait pas envie de me voir me traîner et ne pas m'entraîner avec la rigueur qu'il fallait.
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Sujet: Re: 3. Roger Federer 
Dim 22 Mai 2011 - 7:41
mais fidèle à lui-même, s'il a quelque chose, il ne le dira pas 
6/3 6/4 7/6 
contre Nole. 